dimanche 7 juillet 2013

Nous y revoilà


Back to France, un retour effectué sans heurts, sans mal, mais avec la curieuse sensation d'être des Ovni de retour sur Terre.
Première journée dans le brouillard, mardi, avec les enfants. On n'a pas fermé l'oeil dans l'avion, vu qu'à l'heure de New York, il était seulement 18h quand on a posé le pied à Roissy-Charles de Gaulle.
Mais journée quand même active: petit déjeûner dans un jardin (celui de tonton et tata), ça nous était pas arrivé depuis longtemps, et Félix a rejoint son cousin Achille au Jardin d'acclimatation, sortie scolaire, arrosages en tous genres, grimpettes et sauts de cabris, Félix exténué à l'arrivée.
Les jours suivants, expo (Dynamo, au Grand Palais, super bien, y compris et surtout pour les mômes), resto (La Pointe du Groin, de Thierry Breton, sur les conseils avisés de ma sister-in-law, un avant-goût de Bretagne à Paris), balades - les Champs, le canal Saint-Martin, Belleville - re-resto (comme à la maison, chez "mamma" Raquel, au Baratin)…

A chaque fois qu'on rentre de New York, et même si notre New York à nous, côté Brooklyn, ne chatouille pas le ciel de toute la hauteur de ses buildings; à chaque fois, c'est pareil: la France, Paris y compris, paraît toute petite.

Ce qui frappe en France comparé à NY:
-Le métro comme un jeu de Playmobil. Les voitures colorées et propres de la ligne 5 de Bobigny, les sièges tout mignons, et le train qui ne fait presque pas de bruit, qui se déplace comme en suspension.
-On comprend tout des annonces au micro, articulées comme il faut. Le nom des stations est même répété pour que les voyageurs captent bien.
-Le temps de trajet entre deux stations, bien plus court.
-Le prix du billet! 1,40 euros quand on les achète par dix. Presque moitié prix.
-Y'a la 3G dans le métro, on peut téléphoner.
-Les sirènes des voitures de police qu'on entend à peine comparées à celles de la NYPD pour des pompiers/ambulances de New York.
-Dans cette brasserie près des Champs, comme avec les New Yorkais, le même abord grincheux, suivi d'une chaleureuse conversation à bâtons rompus.
-Pas un taxi à l'horizon, et même si votre métro vient de péter un rail (comme ça m'est arrivé jeudi), ou subir un "accident de personne" (comme ça m'est arrivé jeudi), rien, nada. Les taxis doivent tous être en train de tourner autour de la Concorde, ou de l'Arc de Triomphe. Mais à Bobigny, nothing.
-Oops, les magasins ferment! Pas question de prévoir un achat le soir ou le dimanche.
-La fraîcheur d'un matin ensoleillé, vers 8h du mat', sur un quai du RER. A New York, la chaleur s'accompagne le plus souvent d'une lourde humidité ambiante.
-On ne passe pas sans arrêt de la touffeur de la rue aux températures de frigo dans les magasins ou les restos (air conditionné poussé à bloc). Ça aide à pas se prendre la crève.
-Les fruits ont le goût de fruit.
-Pas un wifi gratuit aux alentours, ni au-delà. Où sont les cafés qui, comme à New York, permettent d'accèder à Internet tout en sirotant un Iced Coffee?
-Les gens habillés de manière raisonnable. Modeste, presque, même, comparé aux extravagances assumés et je-m'en-foutistes des New Yorkais.
-Personne ne paie en cash.
-Et surtout, tout le monde parle français. Les premiers jours, on continuait à leur répondre "Thank you", "Sorry", "Please" et compter en dollars au lieu des euros. Pourvu que ça dure!

mardi 2 juillet 2013

Faire et défaire


Ces dernières semaines avant le départ (c'est aujourd'hui lundi!), il m'a fallu sortir en douceur du quotidien que je m'étais construit ici, sans trop souffrir du déchirement. Vendre les meubles - sur Craigslist, l'inspirateur du Bon Coin -, négocier notre bail avec le proprio de l'appart, puisque, en tant qu'étrangers sous visa, il nous avait fallu payer un an d'avance et que le bail s'achevait fin août, etc. Refaire les démarches administratives à l'envers, m'extraire progressivement de mon American way of life, de mes habitudes, de mon quartier

Un an après, il me faut tout refaire à l'envers, défaire les mailles que j'avais tricotées, pas toujours facilement mais j'y étais arrivée.
Désinscrire les enfants des écoles qu'il ne fut pas facile de trouver, surtout le lycée, en arrivant en août, soit à la fumée des cierges, quand il ne reste plus une place dans un établissement potable - le lycée de Léo, Millennium Brooklyn, était super, on a eu du nez. Couper la carte de crédit - que j'avais eu bien du mal à obtenir, et encore, sous conditions - au bout de trois mois d'utilisation (une vraie carte de crédit, c'est-à-dire qui donne accès aux achats à crédit, un piège à consommation, mais un vrai sésame pour la vie aux Etats-Unis). Ranger ma carte de correspondante de presse étrangère, ma carte d'identité américaine, ma carte d'accès à l'Onu, ma carte de Social security (autre sésame), ma carte de membre à la Food Coop qui nous faisait des prix imbattables sur la bouffe.

Les amitiés, les papiers, les projets, les magasins, le métro

On avait fini par nous établir vraiment, comme de vrais New-yorkais. On circule partout, et pas seulement a Manhattan, dans cette ville que nous avions fait nôtre. Les enfants aussi, se débrouillent tous seuls (les deux aînés): ils peuvent se rendre de Manhattan 6e avenue à Prospect Park, Brooklyn, au ciné, et rentrer à l'appart.

Ça ne se perdra pas, ça restera dans mes circuits imprimés comme une carte sensible et familière.
Je sais par coeur où les trains s'arrêtent, dans quelles direction vont. Je sais où aller pour les fringues de sport (Modells, au bout de la rue ou dans Midtown ou en face de Barclays center pour les maillots des Nets), pour les nippes vintage, pour la bouffe pas chère (tres important, la bouffe pas chère), pour les matches de basket, en salle ou de rue, pour croiser les copains du quartier, pour un Brooklyn burger ou un bon asiatique.

Il va falloir reprendre la façon française, pas demander "Comment allez-vous aujourd'hui?" à chaque fois qu'on croise quelqu'un, pas faire un détour de trois kilomètres pour éviter de frôler un passant sur un trottoir étroit, réécrire les 7 et les 1 avec une barre au milieu et une barre en haut, reprendre l'écriture cursive, oublier les lettres d'imprimerie...

Et vivre les dernières fois.