mercredi 31 octobre 2012

Frankenstorm file le blues à Halloween

Dans la grisaille de Sandy-l'ouragan, je pensais qu'Halloween allait redonner des couleurs à la ville. Tempête passée, jour sans école: tout était réuni pour une super journée dédiée aux enfants et aux déguisements.

Toujours pas d'école
Mmoui. Pas complètement. D'abord, les jours sans école, c'est bien au début, mais à partir du troisième, une légère morosité ambiante s'installe dans les familles. Ensuite, les jours sans école, ça veut dire annulation de toutes les festivités d'Halloween prévues, justement, à l'école.
Nous, aujourd'hui, à PS (public school) 139, l'école de Félix, il devait y avoir Pumpkin Patch (traduisons librement par Journée de la citrouille, chaque enfant devant trouver son curcubitacé préféré et le ramener à la maison). Et vendredi soir, les parents d'élèves superactifs que je viens de rejoindre organisaient Harvest Night, ce qui signifie, précisément, Nuit de la récolte (de pumpkins, vous suivez toujours?).

Ce matin, dans le froid et sur les marches de l'école (ben, oui, l'établissement était VRAIMENT fermé), les parents d'élèves réunis en assemblée informelle de quatre personnes ont pris la difficile décision de tout supprimer. Sage puisqu'à midi, nous apprenions qu'en effet, toutes les écoles publiques de New York restaient closes jusqu'à lundi.

Rendez-nous le métro!
Il faut dire qu'il reste un obstacle majeur. Le métro, le fil de vie de tous les New Yorkais, ce fil qui les relie les uns aux autres, à leur travail (essentiel), à leur famille (essentiel aussi), à leur école (...), le métro donc, est en rade depuis dimanche soir.
Sans métro, le New Yorkais est immobile. Le métro est son oxygène, ses jambes, sa liberté (sauf en cas de travaux sur les voies).
Sans métro, New York étouffe.
Constaté ce midi, dans les embouteillages de Brooklyn; le quartier de Park Slope est resté complètement bouché toute la journée par le trafic des voitures essayant de se rendre à Manhattan, de l'autre côte de l'East River.

Séquence émotion
La MTA, la compagnie qui gère le métro, a des excuses. Elle a d'ailleurs publié en milieu de journée, sur son site Internet, des photos qui ont fait fondre d'émotion les habitants si attachés à leur subway.

en voici deux exemples:



Il s'agit de la station South Ferry, au sud de l'île de Manhattan, qui a été inondée jusqu'au plafond. On comprend que redémarrer un réseau pareillement touché ne se fait pas d'un coup d'écope!

Hier soir, petite lueur d'espoir: on annonçait que les métros repartiraient en partie demain matin, jeudi, sauf dans le sud de l'île, qui reste privée d'électricité en-dessous de la 39e rue.

Et j'ai raté mes photos d'Halloween

Est-ce un lien de cause à effet? Moi qui me régalais des photos que j'allais pouvoir vous montrer, le défilé des enfants de mon quartier, les mêmes petits en quête de bonbons dans les maisons victoriennes derrière chez moi, j'ai tout raté.

J'ai juste pu sauver cela:
(Félix en vampire, et Noé)

et cela:

(Noé en Mister Bizarre)

ou encore cela:

(je vous dis que je n'avais pas assez de lumière...)

A ma décharge, le défilé a eu lieu diablement tôt, plus tôt que d'habitude et lorsque nous sommes arrivés, tout le monde était déjà dispersé. La nuit aussi m'a semblé tomber plus vite. Ciel bas, horizon nuageux. Résultat: plus assez de lumière pour les photos!
Les habitants ont joué le jeu, s'installant sur leurs perrons en costumes (ici, Halloween est autant une affaire d'adultes que d'enfants), pour distribuer des poignées de sucreries. Mais comment ignorer le grand nombre d'arbres déracinés tombés, ici sur un toit de maison classée, là sur une voiture garée. Drôle d'atmosphère.

mardi 30 octobre 2012

Privée de courant, Manhattan attend

Impressions d'une balade, à moitié à pied, à moitié en taxi, dans le sud de Manhattan. Départ de Brooklyn vers 14h30, aujourd'hui mardi, avec un "service car" (un taxi de compagnie, pas un jaune, quoi) pour aller voir ce qui se passe de l'autre côté de l'East River. Branches à terre, poteaux électriques même, et du haut du Brooklyn Bridge (le Manhattan Bridge était fermé), la surprise: l'eau est rentrée dans son lit, déjà.

(sur cette photo, prise du pont de Williamsburg, vers 15h, on voit qu'elle déborde encore sur la terre, mais il n'y en a presque plus)


Gros soucis dans le sud de Manhattan

La tempête est passée. Les problèmes restent. Le point le plus crucial, ce mardi, était le sud de l'île. A partir de la 42e rue et jusque vers Battery Park/South ferry, plus d'électricité. Et plus d'électricité, ici, cela signifie: plus aucun commerce ouvert, restaurants et échoppes asiatiques compris - situation RARISSIME!; plus de machines de retrait d'argent; plus de téléphone, plus d'Internet; plus d'eau chaude. Plus de salaire, non plus, pour les employés de toutes les entreprises obligées d'attendre le retour des kilowatts pour repartir. On parle de quatre à cinq jours d'immobilité. Tout ça parce que ConEdison, l'électricien en chef des Etats-Unis, a omis de protéger un générateur situé à la 14e rue, tout près de l'eau, et qui a... explosé, lundi soir, dans les inondations! Ambiance très grise et très morose dans un Lower East Side habituellement survolté.

(Au croisement de Delancey et Essex, l'image rarissime de feux tricolores à l'arrêt)

Les transports en mode retour

Autre gros point noir: le métro et les bus. La plupart des New Yorkais ne possèdent pas de voiture. Donc dépendance totale du système de transport en commun (ou alors, il faut marcher de longues heures). Ce soir, vers 18h, quelques bus reprenaient du service à Brooklyn. Mais ailleurs... Les officiels parlent de quatre à cinq jours encore de blocage.

Exode vers Brooklyn

Isolés, désemparés dans Manhattan sans énergie, des dizaines de piétons ont passé le pont de Williamsburg, à partir de Delancey street, pour rejoindre Brooklyn, la fée électricité, le téléphone, Internet et les restos.












Sur Bedford avenue, vers 16h, les terrasses affichaient complet.

Et demain mercredi, encore pas d'école. Ouaiiiiiiiis!

Impressionnantes photos de la nuit!

sur:

http://gothamist.com/2012/10/30/gorgeous_photos_of_greenpoint_durin.php#photo-1

(il s'agit d'une publication locale Brooklyn/Manhattan sur Internet)

Ouragan passé

Réveil dans un calme relatif, ce matin. Le vent a fortement baissé, les sirènes se sont presque tues. Nous sommes vraiment passés entre les gouttes.
Sandy ne nous a guère affectés, dans notre appartement de Brooklyn. A quelques miles de là, cependant, d'autres l'ont vu de plus près. Les habitants de Lower Manhattan, un moment sans électricité , les rues bien inondées (jusqu'aux vitres de voitures), ceux d'Hoboken, de l'autre côte de l'Hudson River, dans le New Jersey.




Images impressionnante de l'eau qui monte, s'engouffre dans les tunnels routiers, quelques métros, encercle le manège construit par Jean Nouvel à Dumbo (photo ci-dessus: Brooklyn, mais près de l'East River, sous le Brooklyn Bridge). Environ 200 malades de l'hôpital de NYU ont été évacués entre 18h et minuit, dimanche, parce que l'établissement n'avait plus d'électricité.

(le carrousel de Jean Nouvel entouré d'eau. Il se trouve en zone inondable A, sous le pont de Brooklyn)

Mais pour nous, le seul moment un peu tendu: quand les téléphones portables se sont mis à biper une alerte incitant les habitants de notre zone à se mettre à l'abri. Un instant, à cause du mot "shelter" utilisé, nous avons cru qu'il s'agissait de rejoindre un abri collectif.
Pas de coupure d'électricité, pas de rues inondées près de chez nous, on a même pu regarder "Hellboy", un film de Jerry Lewis sur Netflix.

La question maintenant: quand le système, à l'arrêt depuis deux jours, va-t-il pouvoir redémarrer? Quand va-t-on pouvoir de nouveau se rendre au travail, dans les écoles? (Bloomberg, le maire de New York, a dit que tempête ou pas, les fonctionnaires de la ville étaient attendus au travail ce matin.) C'est LA question de tous les New Yorkais ce matin.

(Sandycation or not? voir sur http://gothamist.com/2012/10/29/poll_are_you_working_today_or_takin.php)

Des voix s'élèvent aussi pour se demander pourquoi personne ne parle de changement climatique, à l'occasion de cet ouragan, comme c'est toujours le cas en pareille circonstance. Serait-ce lié à la campagne présidentielle?

lundi 29 octobre 2012

Frankenstorm et 46 printemps

Un ouragan comme cadeau d'anniversaire! Je dois dire que je suis comblée. Samedi, 46 ans. Dimanche et lundi (et même jusqu'à mercredi apparemment), Sandy-l'ouragan. Quel souffle! Quelle allure! Et pour couronner le tout, le lancement, tant de fois imaginé, tant de fois reporté, de mon blog de Française à New York. Un bonheur n'arrive jamais seul.

Vers 16h, lundi, dans Cortelyou Road totalement vide, avec Antony et Félix. Tous les magasins étaient fermés, à l'exception de Sycamore, le fleuriste bar, et du restaurant Farm on Adderley. C'est la, à Farm, que l'on a passé la soirée pendant que le vent se renforçait à vue d'oeil.





Magicien d'Oz

Sandy, ou Frankenstorm pour les intimes. Quand j'ai entendu l'expression pour la première fois, c'était samedi, en ville, enfin, à Brooklyn où je réside avec ma famille.




Nous étions en pleines courses d'Halloween avec mes deux plus jeunes fils (une sorte de folie pure dans un grand magasin intitulé City Party, rien que le nom, ça donne une idée de l'étendue des dégâts, des files d'attentes dans toutes les allées rien que pour retirer son déguisement préféré, Pinocchio ou Barbarella).
Plantée dans le métro devant une Dorothée du "Magicien d'Oz" et son épouvantail vivant qui partaient faire la fête à Manhattan, j'ai immédiatement associé Frankenstorm à Halloween. La grande fête païenne a lieu mercredi, et la tempête doit frapper mardi.
Je n'avais pas compris que ce surnom désigne surtout l'ampleur du phénomène météo et surtout, la peur qu'il inspire.

Que d'eau
Tout le monde fait le gros dos depuis dimanche matin. Progressivement, les choses se précisent. Samedi, le maire de NY décidait de fermer les transports publics à partir de dimanche soir et affirmait qu'il fallait s'attendre a de grosses quantités d'eau. Sandy, qui remonte encore parallèlement à la côte Est des USA, doit effectuer un virage vers l'Ouest (vers la terre, donc, des Caroline à NY) lundi soir ou mardi. Ce faisant, il ramène l'eau de la mer vers la terre.

Pas d'école, ouaiiiiis!
Hier dimanche, on apprenait que les écoles seraient fermées lundi: cris de joie des mes trois enfants scolarisés. Et que les zones inondables A étaient évacuées, soient 375000 personnes. Pour le dire rapidement, les zones A sont à une demi-heure de chez nous, à Coney Island et Brighton Beach au sud de Brooklyn (nous vivons à Ditmas Park), à l'Ouest de Brooklyn (Red Hook, Dumbo, Williamsburg...) et, bien plus loin, à l'Est toute la zone des Rockaways où vont se baigner les Newyorkais l'été. Autre secteur menacé: tout le sud de l'île de Manhattan, le coin de la bourse, des ferries pour Staten Island.
Sur une photo prise ce matin, l'Hudson River (à l'Ouest) ressemble à une mer qui commence à déborder sous les bancs publics (http://www.thenewyorkworld.com/2012/10/28/sandy-stormwatch/).


Nous sommes tous à l'abri, au premier étage d'un immeuble, à une rue de la zone inondable C. Donc, pas trop de crainte. Dehors, le vent souffle de plus en plus fort. Des branches d'arbres commencent à tomber. Le site Internet local de mon quartier (http://ditmasparkcorner.com) le montre en image. On entend de plus en plus de sirènes au loin.

Le plus dur sera de passer le temps. Les enfants sont sur les ordis, évidemment, un film par ci, une vidéo par là, un skype ou un coup de Facebook... Un ami dans Manhattan me rapporte que les avenues  sont vides,  et les sacs de sables bordent magasins et bouches de métro. En Français bien sceptiques, nous avons fait un minimum de courses. Des reportages télé montrent des magasins pris d'assaut, hier, avant leur fermeture. Haro sur les générateurs électriques! Il est vrai que tant qu'on a de l'électricité, on ne s'ennuie pas. Nous, on a juste des bougies.

Demain mardi, les écoles restent fermées, vient-on d'apprendre (il est 14h ici).