vendredi 28 décembre 2012

330 $ et six mois pour un bout de papier

Des fois, les bras m'en tombent.
Je vous ai épargné la plupart de nos pérégrinations administratives dans cette grande belle ville complexe. La plupart vont de soi, relèvent d'un quotidien sinon banal du moins normal. Mais certaines, vraiment...
Je vous raconterai un jour, si vous êtes sages et quand j'en connaîtrai la fin, l'épopée de la carte de crédit. Mais aujourd'hui je ne résiste pas à la tentation de partager celle du I-94 (et en plus ça me fera du bien).
Le I-94 n'est pas un numéro d'immatriculation mais le nom d'un bout de papier blanc, d'environ 4 cm sur 4 (1,57 inches sur 1,57 inches), que l'on remet aux détenteurs de visa lorsqu'ils entrent aux Etats-Unis. Il donne leur date d'arrivée. Il faut qu'ils le rendent en ressortant du pays.

La procédure telle que décrite sur le site Internet de l'ambassade des USA à Paris, veut que l'agent de douanes agraphe le-dit I-94 au passeport de l'entrant.

Nous, l'agent, y devait pas savoir. Et comme on avait les yeux à peine ouverts vu qu'il était déjà 6h du mat heure française quand on a atterri, on a pas fait gaffe. Y'a pas eu d'agrafage et on a perdu deux I-94 sur cinq. Ceux d'Antony et de Noé.

Jusque-là, no panic. Qu'à cela ne tienne, on le signale et pis c'est tout. Notre date d'arrivée ne figure-t-elle pas déjà sur notre passeport?

Mais on avait tout faux. Le I-94, quand on le perd ou qu'on se le fait voler, ou qu'on le brûle par mégarde ou je sais pas moi, qu'on en fait des avions en papier, c'est super grave et surtout, c'est super notre faute, notre grande faute, séquence culpabilité max: pour le remplacer, les services de l'immigration font raquer 330 dollars par personne, j'ai bien dit 330, soit, dans notre humble cas, trois fois le prix du visa (oui, c'est payant un visa, faut pas pousser quand même).
Et sortir du pays sans lui, c'est prendre le risque de ne plus pouvoir rentrer. Le boulet, quoi.

Donc, comme on a fauté, on casque, 660 dol, et ensuite on attend.
Nous, confiants, guettons la boîte aux lettres à partir de mi-décembre puisqu'on a envoyé la demande autour du 10 (oui, je sais, c'est tard, mais on avait d'autres priorités dans le budget). Et que nos chèques ont été virés.

Et puis hier, j'appelle, juste pour corriger une minuscule erreur dans l'adresse.
Alors pour qui n'a jamais appelé l'Immigration, c'est une expérience. Pour commencer, le gars est obligé de réciter tout un tas de textes réglementaires qu'il débite au pas de charge. No comprendo, mais toute façon, c'est pas fait pour.
Ensuite, sur le même ton rogue vaguement policier, il me demande pourquoi j'appelle. Bon, j'épèle vingt fois mon nom de famille, lui s'exaspère parce que je lui fais répéter presque tout ce qu'il dit (no comprendo ce gars, je vous ai dit), il prend note de la modif.

Et puis, juste avant de raccrocher, j'ose une dernière question:
-combien de temps va prendre le remplacement de nos I-94, sioux plait, myosotis dans les phrases, et tout et tout?
-"Je suis en train de traiter les demandes de juillet."
(Un blanc.)
-"Vous voulez dire que nous ne recevrons pas les papiers avant 6 mois?"
C'était ce qu'il voulait dire.

Et là, je maudis cette administration débordée, paranoïaque et ubuesque.
Payer 660 dollars pour rester coincés dans le pays pendant 6 mois, c'est fort non?

La famille s'élargit


Minette la hamster
Bienvenue à Minette, non, ce n'est pas un chat ni un rat, c'est un hamster. Enfin, une hamster.
Elle est arrivée dans la famille le lendemain de Noël (on devait la récupérer au magasin d'animaux de compagnie la veille de Noël, mais il a fermé plus tôt que l'on croyait). C'est le cadeau de Félix.

On l'a installée dans une cage super cool avec toboggan, échelle et boule qui tourne. Mais la boule grince alors on est obligés de la coincer la nuit pour dormir.

Pour fêter ça, Félix a décidé d'adopter le même look dentaire que Minette, en perdant sa cinquième quenotte depuis notre arrivée. 
La tooth fairy (la fée des dents, l'équivalent de notre petite souris, mais là avec le hamster, heureusement que c'est pas une petite souris, il pourrait y avoir conflit) est passée, tout s'est bien passé. Elle paie en dollars.



















mardi 25 décembre 2012

Y'a pas que Noël dans la vie!

Comme l'a appris Félix à l'école, ici, on ne célèbre pas que Christmas. 

En plus des catholiques, il y a aussi les Juifs qui fêtent Chanuka (du 8 décembre au 16 décembre), fête des lumières symbolisée par le candélabre à neuf branches, dont on allume une bougie par jour. 

Kwanzaa se célèbre du 26 décembre au 1er janvier. Depuis 1966, c'est une fête alternative à Noël, une façon pour les Africains-américains de célébrer leur histoire. 

La piñata mexicaine, davantage tradition que fête, est pratiquée en plein milieu de l'été comme au moment de Noël. Ce ballon rempli de bonbons que l'on tape avec un bâton pour le faire éclater a été inventé par les missionnaires pour sensibiliser les Indiens à la religion (sept pointes sur le ballon représentent les sept pêchés capitaux).

Catholiques, Juifs, Afro-américains, Mexicains... A New York, tous cohabitent. C'est pourquoi ici, on ne dit pas "Joyeux Noël", mais "Happy Holidays" (bonnes fêtes) pour ne pas faire de ségrégation.

(à ce propos, lire le post de Corine Lesnes: http://clesnes.blog.lemonde.fr/2004/12/24/2004_12_christmas_wars/ ).

Noël est moins la fête de tout le monde à la fois qu'en France. Est-ce pourquoi, comme on l'a vu à Manhattan et Brooklyn lundi, pourtant jour de Réveillon et dernier jour pour acheter les cadeaux, il n'y avait pas tant de monde que ça dans les rues. Moins qu'en France, à notre avis.

Il faut dire aussi qu'à cette période, comme pour Thanksgiving, les New-Yorkais quittent la ville pour rentrer dans leurs familles. Avec Pâques, ce sont les trois seuls jours fériés vraiment respectés - la plupart des magasins ferment ces jours-là.



Nous, pour Noël - qui marque notre cinquième mois à New York - on s'est baladés. 

On a vu:

- Le fameux sapin de Rockfeller center:















- L'Armée du Salut danser devant le grand magasin Bloomingdale's:






- Les vitrines de Noël:





- Mickey à Times Square et les illuminations:






Et ça, c'est le retour à Brooklyn, dans le bus, le 24 au soir:


Cadeaux!







MERRY CHRISTMAS!



dimanche 23 décembre 2012

Barber's shop


Félix chez le coiffeur. Chez le barber, plutôt. Parce que cette ville, toute moderne qu'elle soit, a conservé ses barbiers. 
Ils ne coupent pas les cheveux de la manière que les "beauty parlor" ou les "salons", c'est plus rustique. Et c'est que pour les messieurs.
Celui de notre rue est installé depuis 1964. "Chez Vincent's", la déco doit être à peu près la même qu'à l'époque avec son poteau rouge et blanc caractéristique et, surtout, ses magnifiques fauteuils en cuir rouge.



Presque en face a ouvert il y a deux jours une boutique de vêtement qui fait parler d'elle. "Brooklyn industries" est une chaîne tendance bobo. Et le fait qu'elle arrive dans notre rue, encore très cosmopolite, à la new-yorkaise, est le signe indubitable de sa gentrification en cours.








vendredi 21 décembre 2012

L'apocalypse des parapluies

Vous croyez peut-être que la fin du monde n'a pas eu lieu? Pour les parapluies, si. Ce matin, à Brooklyn, une journée démarrée sous la pluie avec un vent à décorner les boeufs... et retourner les pébrocs.

C'est Tonio qui les a vus en premier. Une hécatombe. Désossés, démembrés, déchirés, abandonnés sur l'asphalte par leurs propriétaires.
Voici tous ceux que l'on a pu photographier sur Flatbush Avenue, dans l'espace de trois pâtés de maisons. Parapluie cassé? Parapluie jeté. Vive la société de consommation.





 

 

 


 






Réserve de parapluies encore vivants.

jeudi 20 décembre 2012

Avec les félicitations du jury

On est vachement fiers. Léo a été nommé au tableau d'honneur de son lycée, le "honor roll".
Pour y accéder, il faut avoir des notes au-dessus de 85 sur 100 de moyenne, sans note en-dessous de 80.
Et tout ça, sans aide supplémentaire en anglais, aide qui lui est pourtant due mais le temps que ça se mette en place... ce sera pour la rentrée de janvier.
Bref, doublement remarquable!
On est tous allés à la cérémonie, on en sort et on fête ça autour d'un hamburger.
Le grand moment se passait dans le gymnase, chaque élève répondait à son nom et allait chercher son 'diplôme' sous les hourras de ses potes. Soirée animée en exclusivité par le prof de gym, Mr. 'Muscles' Friedman.
Du pur US. Great!





mercredi 19 décembre 2012

La grande tambouille de l'hygiène



Les microbes ne passeront pas par moi. C'est ce que semble dire cette carte, brandie avec une fierté non dissimulée par Tonio.

Y'a de quoi. d'abord, elle dit qu'il est qualifié en sécurité alimentaire. Ensuite, ça lui fait une "ID" avec photo, c'est toujours ça dans une ville où on ne passe pas un paillasson d'administration sans se faire réclamer avec un sourire parfaitement dissimulé son "ID avec photo" et qu'on voit bien que la carte d'identité française où-que-l'agent-y-sait-pas-distinguer-le-nom-du-prénom, ça va pas l'faire, ni non plus la carte Famille nombreuse de la SNCF ni même le permis République Française. 
Ce qu'ils veulent, les Américains, c'est une carte, une photo et que soit marqué US ou NYC dessus.

Bon, elle a quand même une utilité plus directe, cette carte des services vétérinaires ("Department of Health") de la Ville de New York. Elle permet d'être en règle avec la bouffe. Eh oui, Mesdames et Messieurs, parce qu'ici, au pays de l'agro-alimentaire roi, du McDo aseptisé et des fromages sans goût, on ne badine pas avec les microbes. La carte sert donc précisément à être un expert en flore microbienne et culture bactérienne.

Tout restaurant de New York doit compter au moins un superviseur qui la détient. C'est obligé. La formation coûte 114$ et dure une semaine à raison de 3h30 par jour.

Ce stage a quelque chose entre la réunion des Alcooliques Anonymes ("Bonjour, je m'appelle Antony, j'ai 44 ans, j'ai arrêté depuis un mois de laisser pourrir la mozarella sur mon plan de travail") et le stage de motivation en entreprise (la formatrice, sur le mode collectif: "Est-ce qu'on peut boire le lait au pis de la vache?" L'assemblée des stagiaires: "Nooooonnn!" La formatrice, en mode gospel: "Et pourquoââââ non?" L'assemblée des moutons: "Parce qu'on peut s'empoisonneeeeeeer!" La formatrice, contente de son effet: "Oui, ça peut donner une maladie qui vous attaque la moitié du cerveau et vous restez paralysé." Sympa, le stage cuisine).

Sur le même ton, on aborde la température de cuisson des oeufs (à 145°F), de la viande (à 155°F, et plus quand elle est hâchée car la surface offerte aux microbes est plus grande, c'est dire si Tonio, son steack cru, il pouvait se le mettre sous le bras), des huîtres (ben oui, la formatrice préfère qu'on les cuise).
Quant aux Italiens avec leur tiramisu aux oeufs crus, ils peuvent toujours repasser. Ou bien utiliser des jaunes pasteurisés, ça se fait beaucoup.

Dans la chambre froide, placer en bas tout ce qui peut être contaminant parce que si ça coule, ça ne tombera pas sur les autres aliments. Se coiffer d'une charlotte et enfiler des gants - après s'être lavé les mains pour ne pas contaminer la boîte à gants -, c'est obligatoire pour cuisiner.

Au risque, sinon, d'échouer au contrôle sanitaire. Le genre de truc où l'on voit un type débarquer en cuisine et planter un thermomètre - après stérilisation - dans la viande en attente d'être servie.

Et là, ça rigole moins. Parce qu'une inspection ratée, c'est 1400$ d'amende et un ticket pour une contre-visite quinze jours après. Puis, au final, une éventuelle fermeture.

Une vraie machine à fric dont les critères font parfois dans le flou: les lingettes utilisées en cuisine doivent séjourner dans une bassine avec de la javel (grosse consommation de javel en général, un produit pas trop anodin...), mais en fonction des inspecteurs, le non respect de ce point peut ne pas être relevé ou coûter 8 points et 200$ d'amende. Rigor rigoris... rigolade.

mardi 18 décembre 2012

Rendre les armes

Contre 200$ pièce, les propriétaires d'une arme - en état de marche - pouvait la remettre, samedi, aux responsables de deux églises de Brooklyn. Les 200$ étaient remis sous la forme d'une carte cadeau. Les églises ont récupéré 134 armes.
Mais les spécialistes restent assez peu persuadés, globalement, que les choses changent dans le domaine du port d'armes aux Etats-Unis.
Le lobby pro-armes enfile les perles. Les arguments, d'un point de vue français, sont irrecevables ("si les institutrices avaient possédé un fusil, elles auraient pu mieux se défendre, défendre les enfants et abattre le meurtrier" ou "si on créé des zones sans armes, c'est là que les tueurs viendront en premier"). Mais ici, les choses sont plus complexes.
Quand on parle de changer la loi, il ne s'agit pas d'interdire complètement, mais juste de limiter, de contrôler le port d'arme. Parce que le droit de posséder une arme est inscrit dans la Constitution, cela remonte aux Pères fondateurs. C'est dire.

lundi 17 décembre 2012

Une belle journée d'échecs

Félix a participé à un super grand tournoi d'échecs avec son école, samedi.

Enfin, "super grand"... Grand normalement pour New York, où les échecs sont devenus une matière incontournable, enseignée en classe, pratiquée après les cours...

Le réfectoire où se jouaient les parties.


Des centaines de gamins, d'au moins 25 écoles de toute la ville (Brooklyn, Queens, Bronx, Staten Island compris), dans un building en briques de six étages, l'école publique PS11 de Chelsea: ça vous impressionne un jeune joueur d'échecs, fut-il un champion en herbe!
Arrivée à 9h, un peu endormis par l'heure de trajet en métro, on donne son nom - oui, Félix est bien enregistré, ouf! - et on nous donne un numéro de salle.
Là, une hésitation... Pour quoi faire? Est-ce là que se jouent les parties? No, no, no, nous répond-on cordialement, c'est là que se retrouvent les enfants par école.

Salle 401, donc, montée d'escalier étroite sur quatre étages bien raides, tourner à gauche, à droite, à gauche encore, des dessins d'enfants aux murs, les meilleurs rédactions exposées, des félicitations et des décorations en pagaille: une école à New York aujourd'hui. La cour des maternelles se situe sur un toit: extase de Félix. Mais il y a des caméras dans les couloirs: Félix horrifié.

Bref, la Room 401. Des jeux d'échecs partout, par terre, sur les tables, et déjà deux élèves qui jouent. Félix est immédiatement inclus dans une partie. 

Pendant les parties, les parents attendent dans une salle de classe.

En tout, une quinzaine d'enfants de "notre" école sont venus, avec leurs parents, ce qui permet de faire connaissance (et ce n'est pas rien quand on appartient à une école de 1000 élèves). Les enfants jouaient quatre matchs, quittant la salle 401 à l'appel de leur nom pour gagner le réfectoire, au rez-de-chaussée, comptant des dizaines de parties en cours et des dizaines de têtes brunes, blondes, bouclées, cheveux raides, s'affrontant dans un silence concentré.

Les parents attendaient en lisant des revues, en discutant entre eux, allant chercher de quoi se sustenter dans le hall d'entrée où se vendaient pizzas, hot-dogs et sucreries, du grand classique américain. Les parents sachant jouer, disputaient eux-mêmes une partie d'échecs.
Nous formions comme une petite famille, encourageant tel élève intimidé, félicitant tel autre qui remontait du réfectoire avec une victoire, consolant les perdants.

Félix a gagné deux parties, perdu deux. Il a trouvé le temps un peu long après la première, mais s'est pris au jeu au fil du tournoi. Je pense qu'il veut en refaire un. Ce sera en janvier. Quel compétiteur!

dimanche 16 décembre 2012

Les armes d'Adam, les larmes de Beth

Dans le "Washington Post", le détail cruellement factuel des armes utilisées pour tuer 20 enfants de 6 à 7 ans et 6 adultes, vendredi matin, dans une école du Connecticut.

Adam Lanza a utilisé une carabine Bushmaster, arme qui permet de blesser de manière "dévastatrice" en quelques minutes. Ses balles explosent dès qu'elles ont atteint leur cible. La Bushmaster a été utilisée dans d'autres massacres aux États-Unis. C'est le fusil le plus vendu dans le pays, 1000$ pièce.
Le meurtrier avait aussi deux pistolets. Dont un Glock 9mm semi-automatique, le chouchou des forces de police américaines. Les agents du FBI, les stups, les trois-quarts des policiers new-yorkais en sont équipés. Il a servi dans la tuerie de Tucson, Arizona, où a été blessée la gouverneure Gabrielle Giffords en 2011; dans la tuerie de Virginia Tech en 2007; dans celle d'un ciné du Colorado, en juillet. Il tire cinq balles à la seconde et s'achète dans les 500$.

Toutes ces armes étaient possédées en toute légalité par la mère d'Adam Lanza, enfant perturbé.

Les Américains cesseront-ils un jour de se croire protéger par ces machines à tuer?

Vendredi après-midi, au parc de mon quartier, Beth est arrivée avec son petit dernier. Elle venait d'apprendre ce qui s'était passé à Newport, CT, à une heure et demie de Brooklyn, à côté. Et elle s'est mise à pleurer.

Les oies bernache se reposent à New York

Elles viennent du Canada et leur migration hivernale vers le Mexique s'est arrêtée sur ce terrain de football américain au pied des courts de tennis et des buildings brooklyniens. Lorsque que je les ai aperçues, j'ai immédiatement lâché mon vélo pour les prendre en photo.
Je ne savais pas qu'elles sont ici considérées comme une nuisance. Une campagne d'extermination, renouvelée chaque été, a été eu lieu en 2009 pour réduire leur nombre.
C'était après l'amerrissage d'un avion sur l'Hudson, superbe manoeuvre réalisée en catastrophe par le pilote. Des oies bernaches s'étaient prises dans les réacteurs.



samedi 15 décembre 2012

Invasion de Santa Claus

Pères Noël à Madison Square Garden.



Que font tous ces pères Noël dans les rues de New York? 
Ils participent à une tradition assez bébête mais très suivie: la SantaCon.
Le principe en est assez simple: tous ceux, hommes et femmes, qui veulent s'habiller en père Noël sont invités à le faire, un même jour, et à prendre d'assaut les rues, les métros et les taxis, et surtout, les bars.
Car il faut bien l'avouer, l'affaire se noue avant tout autour de verres à boire. Les Santa Claus (pères Noël) les plus vaillants commencent dès le matin leur petite réunion en rouge, on peut donc imaginer l'état des troupes vers la fin de l'après-midi! 

A New York, cette année, il se trouve que la SantaCon avait lieu aujourd'hui.

A qui se demanderait ce que signifie "Con", il s'agit de l'abréviation du mot "convention" qui, aux États-Unis, désigne de grands rassemblements autour d'un même centre d'intérêt. Comme la convention Star Trek ou la convention Super Héros. 
Et comme les Américains n'ont jamais peur du ridicule, ils y vont déguisés, tous, et pas qu'à moitié. C'est touchant.



A Penn station, énorme noeud ferroviaire.

Dans Chelsea, sur la 8e avenue.



Les adieux de Mr. A


Mr. A est parti hier de Walt Whitman middle School, le collège de Noé. Il a rejoint le poste d'enseignant qu'il demandait depuis longtemps dans le Maine où vivent sa femme et ses enfants.
Mr. A, italo-américain, enseignait depuis dix ans à Walt Whitman. Lorsque, le jour de la rentrée, il a vu arriver Noé et son père à vélo, il a repensé à la blague qu'il avait l'habitude de faire avec un autre prof, un pote à lui: "Je serai muté le jour où j'aurai un élève blanc dans ma classe." Il a obtenu son poste au cours de l'automne. 
Mr. A (il se faisait appeler ainsi à cause de son nom trop long) a raconté cette histoire au moment des adieux à sa classe principale, la 802, celle de Noé qu'il a félicité pour ses rapides progrès en anglais: lui qui craignait de ne pouvoir lui enseigner correctement les Social Studies (histoire, instruction civique, vie politique) !  Il a dit plein d'autres choses aux gamins. Ils ont pleuré. Lui aussi.



vendredi 14 décembre 2012

Présumé coupable

Dans la série des différences notables entre les systèmes judiciaires français et américains, en voilà une, lue hier dans un journal local.
L'après-midi, dans une station de métro (ligne Q/R 49e rue, Manhattan) deux avocats ont distribué, en personne, 500 tracts qu'ils avaient fait imprimer pour appeler les gens à témoigner.
Je doute franchement que cette scène puisse se produire en France.
Ces avocats n'arrivent pas à accéder aux témoins que recèlent les avocats de la victime.
Ils essayent de démontrer que leur client, qui a poussé un homme sur les rails du métro, occasionnant son décès après avoir été percuté par une rame, a été agressé en premier lieu par la victime.
Et comme à chaque fois, le nom et la photo du suspect, placé en custody, est révélé dans tous les journaux. Peu importe qu'il ne soit pas, à ce stade, jugé coupable (même s'il a avoué).

jeudi 13 décembre 2012

Habitez-vous RAMBO?

Le grand jeu des New-Yorkais, c'est d'inventer des noms nouveaux pour leurs quartiers. De créer de nouveaux quartiers, même, par la magie d'une nouvelle appellation.
Exemple: un très joli LoDel, apparu ici ou là cette année, signifiant "Below Delancey" (en-dessous de Delancey Street, une rue du Sud-Est de Manhattan, qui court d'Est en Ouest). Beaucoup moins séduisant, et beaucoup plus complexe: SoDeWeAl (South Delancey West Allen, sud de Delancey ouest d'Allen street). Aucun des deux noms n'est passé à la postérité. Personne dans ces quartiers n'était vraiment au courant.

Parmi les SoPa, NoMad, ProCro, se distingue un BoCoCa (Boerum Cobble Carroll) qui va probablement vous devenir familier: c'est le quartier où la famille Cointre pense ouvrir son resto, à Brooklyn! A suivre...


Les jardins devant les maisons sont typiques de Carroll Gardens.

















Certains de ces acronymes (oui, c'est comme ça qu'on dit) ont déjà une longue histoire et sont établis dans la géographie familière de la ville: NoLiTa (North of Little Italy), TriBeCa (Triangle Below Canal Street), ou Dumbo (pas l'éléphant, mais Down Under the Manhattan Bridge Overpass, ouf!). SoHo (South of Houston Street) aurait lancé cette mode des noms-puzzle dans les années 70.



Dumbo, entre les ponts de Manhattan et de Brooklyn.

L'exercice atteint parfois le sommet du ridicule: comment croire à CanDo, apparu en 2010, pour désigner Canal Downtown, à Manhattan, une zone qui depuis longtemps s'appelle tout simplement le Financial District?
La semaine dernière, GoogleMaps a essayé d'imposer RAMBO pour "Right Around the Manhattan Bridge Overpass" mais devant la bronca suscitée parmi les riverains, l'a retiré sans délai.


On pourrait trouver la démarche rigolote, ou même dotée d'un certain charme sémantique... mais la réalité est bien plus crue. Ce mouvement vient du monde de l'argent. L'idée est la plupart du temps donnée par des agents immobiliers, des penseurs du marketing ou des politiciens businessmen pour mieux vendre leur secteur. Ça, c'est New York.




mardi 11 décembre 2012

D'un fait divers l'autre...

BTW (by the way, comme on l'écrit en abrégé ici, c'est-à-dire "au fait"): l'ultime jugement dans l'affaire DSK a laissé tout le monde de marbre ici, pourtant lieu du crime.
Les habitants du Bronx où vivait Nafissatou Diallo, les "hipsters" (bobos branchés de Brooklyn), les sophistiqués de Midtown, rien à battre.
Même les correspondants de presse que je connais se désolaient de l'exercice obligé qui consiste a faire le pied de grue devant le tribunal du Bronx pour des infos données au compte-gouttes et des images assez peu intéressantes.

Les Newyorkais sont bien plus intéressés par le meurtre qui a eu lieu en pleine rue, à mi-town hier à 14h - un type s'est fait tirer dans la tête. Et par cet homme, le deuxième en une semaine, percuté par un métro sur les rails.


Coup de foudre au musée

J'ai rencontré un homme extraordinaire, aujourd'hui. Un artisan. De ceux qui cent fois sur le métier remettent leur ouvrage.

Je ne me doutais pas qu'il me ferait cet effet. Dès la photo en noir et blanc où il pose en bleu de travail couvant du regard femme et enfant, je l'ai trouvé attirant.

La suite n'a fait que renforcer ma première impression: Henri Matisse (1869-1954) était un battant. Un chercheur. Un torturé du pinceau. Faisant et refaisant. Retouchant, comparant.

C'est le point de vue défendu, et magistralement, par Rebecca Rabinow, conservateur au Metropolitan Museum (Met), organisatrice de l'expo: Matisse, In Search of True Painting (l'expo, presque la même en tout cas, a été montrée au centre Pompidou au printemps dernier).

Ainsi, Matisse, père des peintres du Modern Art, notamment aux Etats-Unis où son influence a été grande, était cet artiste modeste prêt à toujours remettre en question sa création. L'expo montre ce que je ne savais pas: qu'il travaillait par "paires" de tableaux. Ou par séries, quoique le terme s'applique davantage à l'obsessionnelle répétition de la cathédrale de Rouen par Claude Monet. Matisse, lui, donnait dans la réinterprétation permanente.

Lui aussi s'est entiché d'une cathédale, Notre-Dame de Paris. Comme un motif familier : du studio qu'il louait quai Saint-Michel, il avait sous les yeux le bel édifice. Alors, il le peignait, réflexe d'artiste.





Les 49 tableaux qui composent l'expo ne sont d'habitude jamais montrés côte à côte. Là, c'est une chance: les toiles viennent de Paris, bien sûr, mais aussi de Houston, Philadelphia, Floride... Et on passerait des heures à traquer les différences, les ressemblances, l'évolution entre les toiles.

Le luxe 1 et Le luxe II avec, tout au fond, l'esquisse originelle.
Comme pour mieux montrer l'importance que Matisse donnait au travail en cours, sont présentés des photos de ce "work in progress", réalisé entre le 26 février et le 3 avril 1937. Il s'était mis, à partir de la Large blue dress, à peindre par dessus la peinture initiale (alors qu'avant, il refaisait un tableau, reprenait une toile à chaque nouvelle version), comme s'il acceptait de "perdre" quelque chose, en tout cas sa première version.
Lorsqu'il expose à la galerie Maeght, à l'hiver 1945, il demande que soient aussi accrochées les photos des différentes étapes du tableau. Au Met, on trouve trois de ces progressions (ci-dessous, "La France").



J'aime cette façon de documenter, répertorier, garder (l'esquisse, le premier tableau...), qu'avait Matisse. 
Mon amie Jana a eu l'idée de cette visite au musée. C'était une très bonne idée.