dimanche 7 juillet 2013

Nous y revoilà


Back to France, un retour effectué sans heurts, sans mal, mais avec la curieuse sensation d'être des Ovni de retour sur Terre.
Première journée dans le brouillard, mardi, avec les enfants. On n'a pas fermé l'oeil dans l'avion, vu qu'à l'heure de New York, il était seulement 18h quand on a posé le pied à Roissy-Charles de Gaulle.
Mais journée quand même active: petit déjeûner dans un jardin (celui de tonton et tata), ça nous était pas arrivé depuis longtemps, et Félix a rejoint son cousin Achille au Jardin d'acclimatation, sortie scolaire, arrosages en tous genres, grimpettes et sauts de cabris, Félix exténué à l'arrivée.
Les jours suivants, expo (Dynamo, au Grand Palais, super bien, y compris et surtout pour les mômes), resto (La Pointe du Groin, de Thierry Breton, sur les conseils avisés de ma sister-in-law, un avant-goût de Bretagne à Paris), balades - les Champs, le canal Saint-Martin, Belleville - re-resto (comme à la maison, chez "mamma" Raquel, au Baratin)…

A chaque fois qu'on rentre de New York, et même si notre New York à nous, côté Brooklyn, ne chatouille pas le ciel de toute la hauteur de ses buildings; à chaque fois, c'est pareil: la France, Paris y compris, paraît toute petite.

Ce qui frappe en France comparé à NY:
-Le métro comme un jeu de Playmobil. Les voitures colorées et propres de la ligne 5 de Bobigny, les sièges tout mignons, et le train qui ne fait presque pas de bruit, qui se déplace comme en suspension.
-On comprend tout des annonces au micro, articulées comme il faut. Le nom des stations est même répété pour que les voyageurs captent bien.
-Le temps de trajet entre deux stations, bien plus court.
-Le prix du billet! 1,40 euros quand on les achète par dix. Presque moitié prix.
-Y'a la 3G dans le métro, on peut téléphoner.
-Les sirènes des voitures de police qu'on entend à peine comparées à celles de la NYPD pour des pompiers/ambulances de New York.
-Dans cette brasserie près des Champs, comme avec les New Yorkais, le même abord grincheux, suivi d'une chaleureuse conversation à bâtons rompus.
-Pas un taxi à l'horizon, et même si votre métro vient de péter un rail (comme ça m'est arrivé jeudi), ou subir un "accident de personne" (comme ça m'est arrivé jeudi), rien, nada. Les taxis doivent tous être en train de tourner autour de la Concorde, ou de l'Arc de Triomphe. Mais à Bobigny, nothing.
-Oops, les magasins ferment! Pas question de prévoir un achat le soir ou le dimanche.
-La fraîcheur d'un matin ensoleillé, vers 8h du mat', sur un quai du RER. A New York, la chaleur s'accompagne le plus souvent d'une lourde humidité ambiante.
-On ne passe pas sans arrêt de la touffeur de la rue aux températures de frigo dans les magasins ou les restos (air conditionné poussé à bloc). Ça aide à pas se prendre la crève.
-Les fruits ont le goût de fruit.
-Pas un wifi gratuit aux alentours, ni au-delà. Où sont les cafés qui, comme à New York, permettent d'accèder à Internet tout en sirotant un Iced Coffee?
-Les gens habillés de manière raisonnable. Modeste, presque, même, comparé aux extravagances assumés et je-m'en-foutistes des New Yorkais.
-Personne ne paie en cash.
-Et surtout, tout le monde parle français. Les premiers jours, on continuait à leur répondre "Thank you", "Sorry", "Please" et compter en dollars au lieu des euros. Pourvu que ça dure!

mardi 2 juillet 2013

Faire et défaire


Ces dernières semaines avant le départ (c'est aujourd'hui lundi!), il m'a fallu sortir en douceur du quotidien que je m'étais construit ici, sans trop souffrir du déchirement. Vendre les meubles - sur Craigslist, l'inspirateur du Bon Coin -, négocier notre bail avec le proprio de l'appart, puisque, en tant qu'étrangers sous visa, il nous avait fallu payer un an d'avance et que le bail s'achevait fin août, etc. Refaire les démarches administratives à l'envers, m'extraire progressivement de mon American way of life, de mes habitudes, de mon quartier

Un an après, il me faut tout refaire à l'envers, défaire les mailles que j'avais tricotées, pas toujours facilement mais j'y étais arrivée.
Désinscrire les enfants des écoles qu'il ne fut pas facile de trouver, surtout le lycée, en arrivant en août, soit à la fumée des cierges, quand il ne reste plus une place dans un établissement potable - le lycée de Léo, Millennium Brooklyn, était super, on a eu du nez. Couper la carte de crédit - que j'avais eu bien du mal à obtenir, et encore, sous conditions - au bout de trois mois d'utilisation (une vraie carte de crédit, c'est-à-dire qui donne accès aux achats à crédit, un piège à consommation, mais un vrai sésame pour la vie aux Etats-Unis). Ranger ma carte de correspondante de presse étrangère, ma carte d'identité américaine, ma carte d'accès à l'Onu, ma carte de Social security (autre sésame), ma carte de membre à la Food Coop qui nous faisait des prix imbattables sur la bouffe.

Les amitiés, les papiers, les projets, les magasins, le métro

On avait fini par nous établir vraiment, comme de vrais New-yorkais. On circule partout, et pas seulement a Manhattan, dans cette ville que nous avions fait nôtre. Les enfants aussi, se débrouillent tous seuls (les deux aînés): ils peuvent se rendre de Manhattan 6e avenue à Prospect Park, Brooklyn, au ciné, et rentrer à l'appart.

Ça ne se perdra pas, ça restera dans mes circuits imprimés comme une carte sensible et familière.
Je sais par coeur où les trains s'arrêtent, dans quelles direction vont. Je sais où aller pour les fringues de sport (Modells, au bout de la rue ou dans Midtown ou en face de Barclays center pour les maillots des Nets), pour les nippes vintage, pour la bouffe pas chère (tres important, la bouffe pas chère), pour les matches de basket, en salle ou de rue, pour croiser les copains du quartier, pour un Brooklyn burger ou un bon asiatique.

Il va falloir reprendre la façon française, pas demander "Comment allez-vous aujourd'hui?" à chaque fois qu'on croise quelqu'un, pas faire un détour de trois kilomètres pour éviter de frôler un passant sur un trottoir étroit, réécrire les 7 et les 1 avec une barre au milieu et une barre en haut, reprendre l'écriture cursive, oublier les lettres d'imprimerie...

Et vivre les dernières fois.

samedi 29 juin 2013

Mes lignes de métro préférées



Durant cette année, le subway (on dit aussi train) a fait partie de notre vie, comme une prolongation de nos corps, une projection vers la ville.
Notre appartement de Brooklyn se trouve a une demi-heure de la première station dans Manhattan, Canal Street.
On a donc passé beaucoup de temps dans les wagon métalliques habillés de sièges bleus ou orange, beaucoup de temps à regarder les gens, à leur parler aussi, et à contempler le paysage sur Manhattan et ses gratte ciels à chaque fois qu'on passait sur les ponts de l'East River.









J'adore ce métro qui m'horripilait au début. Ses changements brutaux et non annoncés de direction, de fermeture de lignes pour le week-end, de retard "dû à un fort trafic de train". 
Je n'avais pas encore compris que ce métro est un des plus étendus. Pour le prix d'un billet, tu peux te rendre aux plages à une heure et demie de là. Evidemment, pour parcourir la distance entre deux stations, c'est aussi cher et là, tu trouves ça cher, 2,50$.
Je n'avais pas compris que ce métro qui ne ferme jamais doit profiter de certains moments comme le WE, plus calmes, pour faire les réparations. 
Mais il est vrai que comprendre les messages d'avertissement placardés sur les murs en un feu d'artifice de couleurs ou lâchés au micro comme une bouillie de mots, relève de la gageure. Meme les autochtones grimacent d'incomprehension. Des fois, j'ai mieux capté qu'eux, j'étais super fière.


Mes lignes préférées, donc:

La Q. (Couleur jaune sur les cartes de métro) C'est celle qui mène chez nous, à Ditmas Park. Elle fait partie de la famille. Elle est fiable et régulière. Elle part ensuite jusqu'à la mer.
La B. (Couleur orange) Comme la Q, mais en express. Elle ne s'arrête donc pas à notre arrêt Cortelyou Road. Peut dépanner.
La F. (Couleur orange) Une des premières lignes que nous avons emprunté quand nous venions en vacances et qu'on logeait dans le Lower East Side à Manhattan. Elle va ensuite dans des coins que j'aime bien de Brooklyn, Carroll Garden, Gowanus Canal et quand elle sort en aérien, elle  et offre aux voyageurs un des plus beaux panoramas sur Brooklyn.
La 2,3. (Couleur rouge) Mène à Flatbush et Brooklyn College, l'université. Traverse des quartiers ghettos très attachants.
La J. (Couleur marron) Elle file du Lower East Side à Williamsburg, et reste en extérieur passé le Williamsburg Bridge.
La 4,5,6. (Couleur verte) C'est la correspondance, à Canal Street ou Union Square, pour Central Park, le Moma, le Met, la boulangerie Kayser, Astor Place et Mc Sorley's (le plus vieux bar de NY), le consulat français... Léo l'a emprunté méthodiquement, chaque mardi voire jeudi, pour se rendre à son entraînement de rugby, à Randall's Island.
La 7. (Couleur violette) Magnifique panorama sur Manhattan et le début du Queens.
La L. (Couleur grise) Mène, après changement à Union Square, à Chelsea, son marché couvert et sa promenade verte, la High Line.

mercredi 26 juin 2013

Un chouette texte sur les États-Unis

Je vous recommande ce dernier post de l'ex-correspondante de Radio France aux États-Unis. Fabienne Sintes y résume joliment ce qu'est la vie de tous les jours ici, au-delà de son travail de journaliste, le quotidien d'une Française expatriée.
J'y ai retrouvé plein de choses très bien vues et très justes.

http://radiofrance-blogs.com/fabienne-sintes

Et si les USA agissaient enfin contre le réchauffement climatique?

Ici, on appelle ça "global warming" ou "climate change". Et si l'expression est dans bien des conversations ici, à New York, il y a fort à parier qu'elle n'a pas le même succès au Texas ou en Louisiane, états intimement liés à la production pétrolière américaine.
Hier, pourtant, le président Obama a sorti un plan pour réduire la pollution par émissions de carbone. Et je ne vais pas bouder mon plaisir, même si je n'ai aucune idée de la chance qu'aura ce plan d'aboutir.
Il veut édicter de nouvelles règles, parmi lesquelles rendre les bâtiments plus économes en énergie, réduire cette pollution d'au moins 3 milliards de mètres cubes d'ici 2030, rendre les véhicules moins consommateurs de carburant, favoriser les énergies renouvelables, l'éolien et le solaire, etc.

Un des points a particulièrement attiré mon attention: le président veut que son pays mène l'effort international pour réduire les émissions de CO2.
Ironique.
Quand on se souvient de l'attitude des USA aux différents sommets internationaux comme celui de Copenhague où la plus grande nation du monde a fait simplement tourner court les négos en tournant le dos à la discussion...
Comme quoi, l'espoir fait vivre!

New York-sur-Mer

Avec le beau temps, notre appartement s'est transformé en villégiature d'été. Fenêtres ouverte aux courants d'air, rideaux sous la brise, livre, et matins étirés sous la fraîcheur des platanes de la rue...
Et surtout, presque tous les jours la mer.
Quand le métro Q ne se fait pas attendre, l'océan est à vingt minutes. On saute dans un wagon à Cortelyou Road, on passe une quinzaine de stations aux noms familiers, Newkirk Plaza, Avenue M, Sheepshaed Bay, Brighton Beach, Aquarium, Coney Island. Et là, juste après les manèges, au-delà du "boardwalk"- la promenade - la plage.
Habiter à New York, et se sentir en vacances à la mer, ça peut sembler paradoxal, non?
C'est qu'on oublie que New York est une ville sur l'eau.

















































Noyé dans la forêt de building de Manhattan qui obstrue l'horizon, impossible de s'en rendre compte. Pourtant, entre l'Océan, les rivières - Hudson et East - les embouchures, les baies, les marécages, vraiment, l'eau est partout. 
Cela m'est apparu comme une évidence un jour d'octobre, pluvieux et venteux, où je m'étais rendu avec Noé (et Félix qui s'ennuyait un peu), à la porte ouverte d'un lycée pas comme les autres: l'école du Port (Harbor School).
Pour y aller, on avait pris le ferry pour Governor's Island où elle se trouve.
Noé avait tout de suite repéré cet établissement lors d'une "foire" aux lycées organisée à Brooklyn Tech, un des lycées les plus grands et plus cotés du "borough". Noé le plongeur avait flashé sur cette école prépare aux métiers de la plongée.
On peut aussi y devenir aussi capitaine de navire, concepteur de navires. Et sa filière biomarine emmène les élèves jusqu'à l'université.
La première année est commune à tous avec un enseignement de base portant sur la faune et la flore marine de New York. Les lycéens en profitent pour repeupler les colonies d'huîtres locales, un peu mises à mal, il faut bien le dire, par l'activité humaine environnante. Il répertorient les poissons et autres espèces aquatiques, d'ailleurs pêchées par les autochtones mais c'est pas sûr qu'ils les mangent...



Les gens, ici, vont au travail en bateau. Aux heures de bureau, le trafic des ferrys, entre le New Jersey et Manhattan ou Brooklyn et Manhattan, atteint un rythme stupéfiant. 
Certains, au départ de Brooklyn ou de South Ferry, se rendent à Governor's Island, cette île longtemps terrain militaire, où désormais se ruent les New Yorkais pour profiter de la plage et du point de vue à couper le souffle sur les gratte-ciel de Manhattan.





New York est un port, on l'oublie parfois, moins puissant et bien moins actif qu'il ne fut, mais encore présent.




Des quais de l'Hudson River, au Pier 88, on peut partir en croisière vers les Antilles, les mers du sud. Voici une arrivée de voyageurs que j'avais photographiée en novembre, juste après Sandy. Pendant l'ouragan, les gens étaient en voyage. Ils revenaient un peu inquiets:




New York a été construit sur des marécages. Un des plus grands s'appelle Jamaica Bay. C'est là que se trouve l'immense aéroport international JF Kennedy. L'autre jour, dans un jour local, j'ai lu que les autorités envisagent de construire des barricades autour des pistes parce qu'elles sont trop souvent envahies par les tortues qui sortent pondre leurs oeufs dans le terrain sableux des abords de l'aéroport...

Dimanche, les New Yorkais ont rendu hommage à la mer et ses habitants imaginaires. En un de ces carnavals délirants dont ils ont le secret, ils se sont ressemblés à plusieurs milliers (chiffres publiés: 750 000 personnes) à Coney Island pour la Mermaid Parade, le défilé des sirènes.

 Comme le défilé d'Halloween, c'est l'occasion de se lâcher. Chacun peut participer et se déguiser, en sirène, Neptune, méduse, ou poisson. 
On prend le métro en habits de fête et on se mêle à la foule sans autre forme de procès.
On rivalise d'imagination pour se faire remarquer, et on la joue super sexy, avec des costumes réduits au minimum.
Et surtout, on fait la fête! "Party!!!!", ils adorent ça, les New Yorkais.


Dans le métro.
En attendant le métro.
















mercredi 19 juin 2013

C'est la saison des "prom"

Elles parlent au téléphone d'un air enjoué, longues jambes couleur d'ébène au soleil, robes à paillettes, bleues ou crème, décolleté ravageur sur leur rondeurs naissantes. Elles ont sorti les talons doré, les encolures extravagantes, les strass et le lamé. Le maquillage. Les cheveux brushés.

Que font ces jeunes filles en fleur, croisées rue Cortelyou, à Brooklyn, en cette fin d'après-midi?
Elles attendent leur "date" (cavalier) pour se rendre à leur "prom".

Dans un magasin de Flatbush Avenue, photos de mon pote Charles Dominique.





"Prom"? Quésako ? C'est le raccourci de "promenade", le bal de fin d'année pour les élèves qui ont obtenu un diplôme scolaire.
A l'origine, la "prom" marquait la fin du lycée. Désormais, c'est tout ce que l'Amérique compte de gamin en fin de cycle qui est prise de la folie "prom".
J'ai même entendu parler de "prom" organisée à la fin de la maternelle!

En ce moment, dans l'avenue Flatbush, dans l'avenue Church, les boutiques débordent de robes à froufrous, de pompes à brides flashy et de costard-cravate.
Parce que la "prom", pas question d'y aller habillé comme un loqueteux.

Et je peux en témoigner: mon fils Noé, 14 ans, danse actuellement à sa "prom" de fin d'année. Il vient de finir le collège (ici, la "middle school" se termine un an plus tôt qu'en France, donc après la 4e), a réussi ("passed") dans toutes les matières, donc, il obtient son diplôme ("he graduates"). Donc, il a droit à la "prom".

Classe, mon fiston, non?

C'est sa première surprise "prom" party!

Ce qui veut dire, concrètement, une sorte de cauchemar pour les parents, surtout comme moi qui m'y suis pris au dernier moment because je n'étais pas trop au courant des us et coutumes.
Il a fallu trouver un tailleur et lui acheter un costume pas trop cher qu'il ne remettra sans doute jamais mais qui lui va super bien, et une cravate. La chemise a été prêtée par le collège.

Les chaussures... J'ai refusé de céder à l'injonction de l'invitation au bal qui disait: "Pas de baskets ou vous serez refusé à l'entrée". Je n'ai pas acheté de chaussures habillées, en cuir et qui le vieillissait de quinze ans - comment pouvait-il danser dans un tel carcan et quand les aurait-il re-portées?
On a pris un truc intermédiaire, genre Vans, gris clair et propres sur elle, on s'est dit que ça passerait.

Il était pas peu fier de son look trop classe.

Il est 19h33, Noé n'a pas appelé en mode SOS, il a dû être accepté au bal des débutants.

Back to France

On était venus ouvrir un resto en famille à New York.
On repart après un an, une expérience unique, riches d'une deuxième langue, d'une deuxième culture, d'un autre chez-nous sur Terre, mais pauvres comme Job. La ville du billet vert a eu raison de notre projet. On n'a plus un rond. On rentre.

"God is broke", dit le musicien Bobby Womack dans un de ses disques. Même Dieu est fauché dans ce pays!

Et en effet, pour ouvrir un resto a New York, il faut:

-De l'argent. Beaucoup d'argent. Des investisseurs convaincus. On n'en avait pas assez.

-Du temps. A moins d'ouvrir un boui-boui à peine légal dans un ghetto de East Brooklyn, chercher un local (il faut un broker, c'est-à-dire un agent immobilier qui travaille pour soi, nous on n'en avait pas), signer le bail (ça peut prendre plusieurs mois en aller-retour entre avocats, le bail étant considérablement épais), donner quelques dessous de table en liquide, vérifier que le bâtiment soit bien adapté à l'activité resto, aux normes incendie, aux normes sanitaires, demander les permis de construire, les autorisations de vendre de l'alcool, tout cela dans des administrations réparties façon puzzle dans cette ville tentaculaire...
Cela peut prendre des mois et des mois. Parfois plus d'un an. Parfois trois, de l'idée à la réalisation. Pendant ce temps, il faut vivre, donc pouvoir tenir financièrement.

-Des papiers pour travailler. Il y a ceux qui permettent de bosser  sans conditions, et ceux qui limitent sérieusement la recherche d'emploi. Peu de visas autorisent vraiment à travailler tous azimuts. Le mieux étant évidemment d'être résident. Ou d'avoir une carte verte, presque l'équivalent de la nationalité américaine, le Sésame. Nous, c'était visa, un plutôt bon, mais trop limité.

-Une capacité d'adaptation à la façon de manger américaine, et surtout, à la façon new yorkaise d'aller au resto. Un rituel différent de celui des Français, mais qui fait loi. Service surdimensionné (c'est possible puisque les serveurs sont payés au pourboire), extrêmement attentionné. Accueil, ambiance (en général: bougies, donc on ne voit pas ce qu'on mange, et musique à donf, donc on entend pas son voisin), déco soignée (ils sont très forts en vintage brique/fer/verre).
Des produits pas toujours top mais très bien arrangés. Beaucoup de choses pas trop cuisinées, genre sandwich amélioré ou salade avec un rien de je-ne-sais-quoi.
Et surtout, des classiques que le client peut retrouver à chaque fois qu'il vient, quelque soit le moment de l'année et l'humeur du patron, et réalisés exactement de la même manière d'une fois sur l'autre. Genre: "mac and cheese", c'est-à-dire le simple macaroni and cheese de l'enfance, mais exécuté exactement comme ils s'en souviennent. 

- Pour pouvoir tenir sans revenus immédiats, le budget perso prend une importance considérable. Surtout pour une famille de cinq comme la nôtre. On ne venait pas d'un pays où on crève la dalle, et, à 45 ans, on était habitués à un certain niveau de vie. Nos enfants aussi. Impossible de couper dans toutes les dépenses (plus de ciné avant deux ans!) ou de vivre à cinq dans deux pièces, comme certaines familles dans notre quartier, venues des Caraïbes, du Tibet ou d'Amérique latine, pour lesquelles vivre à New York, quelques soient les conditions, est déjà un luxe en soi. Nous, assurance médicale comprise (2000 $ par mois) et loyer dans les 3000 $, il nous fallait  gagner minimum 8000 $ par mois.

- Rester soudés, quoiqu'il arrive.

Bref, la marche était trop haute.

Une des profs de science de Félix, ignorant qu'il rentre au pays, le louait l'autre jour dans ces termes: "Félix a tellement progressé en anglais que dans quelques temps, les gens croiront qu'il est né ici."
Eh, oui, mes enfants ressemblent aux gamins d'ici. Casquette sur la tête, "check" (taper dans la main) aux potes qui passent dans la rue, "hi" (hello) aux camarades d'école avec juste un petit geste de la main, vocabulaire ad hoc...

Fidèle lecteur, ne désespère pas, cependant. J'ai encore plein d'histoires à raconter avant notre départ, le 1er juillet. 
Reste branché sur mon blog. "Stay tuned", comme on dit ici.

mardi 11 juin 2013

La science au coeur de l'école

La nuit de la science, à l'école PS 139, celle de Félix, c'est pas rien!

Depuis quelques années, c'est même devenu un des événements majeurs de l'établissement de notre quartier, 1000 élèves, pourtant pas spécialement favorisé et qui compte un des plus grands nombres d'écoliers "ELL", c'est-à-dire English Langage Learners - bref, qui ne parlent pas anglais. A PS 139, la mixité sociale, ethnique, culturelle, du Mexique à Haïti, en passant par le Tibet, fait l'admiration des progressistes, c'est dire!

La science, aux États-Unis, sert énormément de moyen d'apprentissage et d'image de marque dans les écoles. La science, et l'art.

Deux mascottes accueillaient les participants.

La fête se tenait aujourd'hui, de 16h à 20h, à tous les étages, dans toutes les salles de classes, le gymnase accueillant l'essentiel du travail des élèves: leurs projets de classe ("science projects").



Certains ont travaillé sur le mouvement, d'autres sur la vie des plantes, les ouragans - en s'appuyant sur la tempête Sandy - ou les pluies acides.




Le succès du "gym" avait beaucoup à voir, aussi, avec les maquillages et personnages en ballons gonflables que l'on pouvait y trouver.


 


Mais pour une fois, il n'y avait pas les stands de bouffe et de sodas qui ne manquent jamais de ponctuer les manifestations familiales. Bon signe!

Le reste était à l'avenant : du vrai bon boulot pédagogique pour les enfants et par les enfants de toutes les classes. L'exemple le plus remarquable: la salle des inventions.

Les enfants qui le souhaitaient pouvaient produire une invention de leur choix et la présenter.

Parmi les bonnes idées, un lavomatique où l'on peut se distraire pendant que son linge se lave (en maquette), un photocopieur facile à utiliser, un piège à souris super perfectionné… Et puis des "bouncing speakers", baskets rebondissantes, une super idée de Félix.
Sur l'explication du but de son invention, il a écrit que ces chaussures sont très pratiques pour faire des smashs ("dunks") au basket. Et c'est vrai!
Ces inventions font l'objet d'un concours dont nous connaîtrons les résultats cette semaine... L'attente est insupportable.


La salle des inventions.
Félix et ses "bouncing sneakers"



La lampe à commande à distance.

On pouvait aussi recréer l'habitat naturel de certains animaux, apprendre tout sur les perroquets avec un vrai de vrai et son maître, mieux connaître les chouettes, faire des oeuvres d'art avec du matériel recyclé... Une équipe du zoo de Prospect Park apportait ses connaissances.

A la cafèt, un planétarium gonflable pour tout comprendre des étoiles et constellations. On y entrait par une petite galerie toute sombre, magique.

Quand je suis retournée à l'auditorium, le coeur battant de l'école, là où les classes se regroupent le matin avant de se rendre dans leur classe le matin, où les gosses regardent un film à la récré dès qu'il pleut, où ont lieu les réunions de parents, où sont données les discours et les concerts, une bande de profs chantaient en karaoké.

C'était juste avant que ne commence le show des reptiles, sur la scène: un type d'une asso du New Jersey, qui récupère ce genre de gentilles bébêtes chez les proprios dépassés (ben oui, ça grandi un bébé alligator!), a présenté à une salle comble, pleine de gamins et de leurs parents, un boa constrictor, une tortue à carapace molle, un alligator de Floride...
Bon, on voit pas bien, mais là, il a le boa constrictor sur l'épaule.

Tout le monde enchanté et baba, moi la première, de voir une école proposer ce genre de show, plus fréquent dans les parcs animaliers de Floride.
Au pays de la sécurité à tout prix, ce n'est pas le moindre des paradoxes. Tant mieux.


Et voici quelques photos de l'intérieur de l'école: